Madeleine de Jauréguiberry, fondatrice de Begiraleak, premier mouvement de femmes en Iparralde Madeleine de Jauréguiberry, fondatrice de Begiraleak, premier mouvement de femmes en Iparralde Isabelle de Ajuriaguerra Le 20 juillet et 17 août 1934, dans l'hebdomadaire en euskara Eskualduna sous le titre de Begiraleak, paraît un appel à toutes les femmes basques à se regrouper pour travailler ensemble autour du programme « la foi, la langue, les traditions ». Les deux articles sont signés de Melle Augusta Larralde, à l'adresse de la rédaction de Gure Herria à Ustaritz (B.P.) La mystérieuse Augusta Larralde n'était autre que l'abbé Pierre Lafitte lui même ! Madeleine de Jauréguiberry fut la première (et la seule) femme à répondre à cet appel. I La naissance de Begiraleak L'abbé Lafitte connaissait l'existence du mouvement de femmes nationalistes du Pays Basque péninsulaire Emakume Abertzale Batza (E.A.B.) créé à Bilbao en 1922 et qui comptait en 1934 environ 20 000 membres dans les 4 provinces d'Hegoalde. Certaines de ces femmes propagandistes de talent interviennent même en qualité d'oratrices dans les meetings politiques du Parti Nationaliste Basque. Les mitineras brisent un tabou : les femmes sortent de la sphère privée pour prendre la parole en public sur des sujets politiques. Madeleine de Jauréguiberry et l'abbé Lafitte. Pour bien comprendre ce que ce projet avait de novateur, il convient de rappeler brièvement quelques jalons de l'émancipation des femmes : 1907 : la femme mariée pourra disposer de ses revenus ; 1919 : le pape Benoît X se déclare favorable au vote des femmes ; 1919 : le baccalauréat féminin est créé. 1920 : la femme a le droit d'adhérer à un syndicat sans l'autorisation de son mari. Années 1930 : en France, la femme n'a pas encore le droit de vote. Celui ci est accordé déjà dans les Pays Scandinaves, en URSS, au Royaume Uni, aux Pays Bas, en Allemagne, au Brésil en Espagne et en Turquie. C'est dans ce contexte que naît Begiraleak, groupeeskualerriste féminin. Sa naissance prochaine est annoncée dans la brochure Eskual Herriaren Alde parue en novembre 1933. Cette brochure inclut expressément les droits de la femme, cette promotion étant à mettre en rapport avec la situation juridique de la femme dans le vieux droit basque ; le droit de vote pour les femmes y est relevé en particulier avec insistance. II Le travail de Begiraleak Un groupe de Begiraleak se forme à Saint Jean de Luz dès le début de l'année 1935 et organise des cours de langue basque, des séances de théâtre basque et des conférences sur des sujets ayant trait au Pays Basque. Les jeunes femmes basques membres de Begiraleak se veulent actives et dynamiques et certainement pas passéistes et conservatrices ; ce mouvement ne participe pas t il pas au renouveau du Pays Basque dans les années 1930? On lit dans Aintzina en juin 1936 : « Nous ne sommes pas des conservatrices, nous sommes des amies de l'action basque... Par contre, nous sommes jeunes : et la jeunesse, quoi qu'on dise, c'est l'heure de la joie, de l'entrain, des initiatives hardies. Et c'est pourquoi, on ne gémit pas chez les Begirale : on vit, on chante, on danse au milieu des travaux ». Madeleine de Jauréguiberry n'oublie pas pour autant que les Begiraleak se situent dans la mouvance eskualerriste ; elles se doivent donc d'aider financièrement le mensuel Aintzina. Elle élabore un brouillon de statuts qu'elle adresse fin 1934 à l'abbé Lafitte. Les principes adoptés sont les suivants : organisation souple et indépendance de chaque groupe local (Gure Etchea) ; parfaite égalité entre les groupes locaux ; l'organisme central est un secrétariat général qui « aura pour mission de coordonner l'action de tous les groupements du Pays Basque ». Si on considère la mission assignée aux Begiraleak, on s'aperçoit qu'elle est centrée sur la culture (langue basque, culture, traditions) et que l'action politique traditionnelle est laissée aux hommes. Mais est ce réellement surprenant dans la sociétéd'avant la seconde guerre mondiale, à une époque où les femmes sont encore dans l'Hexagone privées de suffrage ? Il n'en reste pas moins que Begiraleak réalise dans les années 1934 37, un gros travail. Des groupes se constituent : on en compte jusqu'à 31 en mars 1937 (15 en Labourd, 8 en Basse Navarre, 8 en Soule). En 1975, à l'occasion de l'Année Internationale de la Femme, Madeleine de Jauréguiberry sera nommée membre d'Honneur de l'Académie de la Langue Basque Euslkaltzaindia et reçue à ce titre à la Diputación de Saint Sébastien. Il était temps ! Elle avait alors 91 ans ! Madeleine de Jauréguiberry a ouvert une voie par son action inlassable. Elle se reconnaîtrait peut être dans toutes ces Begirale d'aujourd'hui qui se battent au quotidien pour cette langue et cette culture. Elles réalisent un travail de fond et peu d'entre elles apparaissent au grand jour ; elles ont toutes la langue et la culture basque au cur. Rendre hommage à Madeleine de Jauréguiberry, c'est leur rendre hommage aussi. Isabelle de Ajuriaguerra, Enseignante d'histoire Photos: Bidegileak 19 (Eusko Jaurlaritza) Euskonews & Media 140.zbk (2001/10/19 26) Eusko Ikaskuntzaren Web Orria
Webgune honek cookieak erabiltzen ditu, propioak zein hirugarrenenak. Hautatu nabigatzeko nahiago duzun cookie aukera. Guztiz desaktibatzea ere hauta dezakezu. Cookie batzuk blokeatu nahi badituzu, egin klik "konfigurazioa" aukeran. "Onartzen dut" botoia sakatuz gero, aipatutako cookieak eta gure cookie politika onartzen duzula adierazten ari zara. Sakatu Irakurri gehiago lotura informazio gehiago lortzeko.