Le Guide du Pèlerin et l'union des chemins de Saint Jacques en terre des Basques et en Navarre Pour une relecture du texte latin Clément Urrutibéhéty Le Guide du Pèlerin du XIIe siècle fait autorité, et nous souscrivons pleinement au prologue, à la première phrase du livre, selon laquelle le lecteur en quête de vérité est sûr de l'y trouver. Que dit très brièvement le premier chapitre consacré aux chemins de Saint Jacques? Les itinéraires de Tours, de Vézelay et du Puy ad Hostavallam coadunantur, se réunissent à Ostabat, si l'on s'en tient à la traduction proposée par l'initiative du livre, reprise et généralisée sans contrôle. Passé le port de Cize, cet itinéraire et celui du Somport d'Aspe ad Pontem Regine sociantur, se rejoignent à Puente La Reina, suivant ce mode de lecture, qui bute sur la préposition ad. Là où il semblerait ne pas se trouver de pierre d'achoppement et de difficulté majeure. Une règle unanime en effet, et au delà des Pyrénées, dans les dictionnaires latin français et latin espagnol, s'applique à la préposition ad associée au nom d'une ville, pour indiquer la direction, le mouvement vers, ou la proximité près de. Tous les exemples concordent et abondent dans ce sens. Le professeur Colas, auteur de la Tombe Basque, et précurseur des chemins de Saint Jacques, interprète fidèle du Guide, signalait leur convergence vers Ostabat, non à Ostabat même. L'auteur du Guide ne déroge pas à la règle générale. Il suffit pour s'en convaincre, et ne pas le trahir, d'appréhender le tréfonds de sa pensée à travers le contexte, de confronter l'ensemble des chapitres, et de recenser le nom des villes dans leur accompagnement grammatical. Le Guide, pour marquer la localisation dans une ville, et l'emplacement d'un objet, d'une personne, ou d'un tombeau, emploie la préposition in, dans, le plus souvent apud, à même la ville, en excluant la préposition ad, vers, en direction, près de. Il situe le corps de l'apôtre dans la ville de Compostelle, in urbe Compostellana,tandis que les itinéraires de Saint Jacques s'inscrivent vers Saint Jacques, ad Sanctum Jacobum. Le chapitre VIII recommande de visiter et honorer en cours de route les tombeaux des martyrs et des saints : les compagnons d'armes de Charlemagne dans les landes de Bordeaux, in landis Burdegalensibus, à Belin. Le corps de Roland dans la basilique Saint Romain à Blaye, apud Blavium. Le tombeau de Saint Seurin et le cor d'ivoire de Roland dans la ville de Bordeaux, apud Burdegalem urbem. Le corps de l'évêque saint Hilaire dans la ville de Poitiers, in Pictava urbe. L'auteur est moins prolixe dans le versant espagnol, où il cite le corps de saint Isidore dans la ville de Léon, apud urbem Legionem. Le chapitre XI privilégie l'accueil des pèlerins et invite chaque habitant à exercer l'hospitalité. A Nantua, apud Nantuaium, où un tisserand ayant refusé du pain à un pèlerin voit sa toile se déchirer par son milieu. A Villeneuve, apud Villamnovam, le pain sous la cendre se transforme en pierre, après le refus d'une femme. Dans la ville de Poitiers, apud urbem Pictavorum, seule la dernière maison ayant offert l'hospitalité à un pèlerin échappe à l'incendie de la rue. Le livre se termine par l'énumération des manuscrits écrits en plusieurs endroits, principalement à Cluny, apud Cluniacum, dernier recours à apud, spécifique, sans confusion avec ad. Le chapitre VII relatif aux contrées traversées et au caractère de leurs habitants est suffisamment explicite sur l'état des royaumes d'Aragon et de Navarre, et détermine une date limite à la composition du Guide du Pèlerin. A deux reprises, il est question du roi d'Aragon, puis du royaume d'Aragon. Le roi d'Aragon, pris dans l'engrenage des péages basques, n'est pas épargné. Il figure en tête des bénéficiaires de ce tribut exigé des pèlerins, avec les péagers d'Ostabat, de Saint Jean et de Saint Michel Pied de Port. Les péages appartenaient au domaine du royaume de Navarre, rattaché au temps du Guide et d'Alphonse le Batailleur au royaumed'Aragon. Les appellations de Saint Jean et de Saint Michel Pied de Port au XIIe siècle basculeront au XIIIe, et deviendront Saint Jean Pied de Port et Saint Michel le Vieux, prélude à l'oubli du village dans le renouveau jacquaire, et ce malgré la première étape de Saint Michel à Viscarret, les hôpitaux de Saint Michel et de Saint Vincent Pied de Mont, et le miracle du pèlerin lorrain décédé au port de Cize après une nuit de veille à Saint Michel. Secouru par l'apôtre, il est porté avec son compagnon en croupe, et franchit d'une traite dans la nuit toutes les étapes jusqu'au lieu de sépulture au monastère de Mont Joie. L'auteur du Guide appelait une sentence d'excommunication publique sur le roi d'Aragon sur les détenteurs des péages et leurs complices, sur les prêtres qui leur conféraient les sacrements, comme sur les seigneurs des eaux des gaves, les abbés du monastère de Sorde ouvertement désignés, à qui les passeurs remettaient le prix de la traversée. Quelques lignes plus loin, le Guide étendait son regard du haut du port de Cize sur la mer dite de Bretagne, et sur les royaumes de France, de Castille et d'Aragon, incluant celui de Navarre. L'intermède arago navarrais, durant 58 années sous le règne de trois rois, prenait fin au décès d'Alphonse le Batailleur, roi d'Aragon (1104 1134). La composition du Guide, fixée vers les années 1139, doit être revue quelque peu à la baisse, à la date limite de 1134. Le Prieuré de Navarre de l'Ordre de Saint Jean de Jérusalem à Pampelune, rattaché à l'Aragon pendant cet intermède arago navarrais, est resté uni à la langue d'Aragon, après la restauration du royaume de Navarre. Dans le palais d'Aragon à la Valette, sont regroupés bien en vue en haut de l'escalier d'honneur, les armes jumelées d'Aragon et de Navarre. La ville de Saint Palais, encore moins son péage, n'existaient au temps du Guide. La naissance de la ville neuve de Saint Palais doit être contemporaine des autres villes neuves nées de la route au début du XIIIe siècle,de Garris à Ostabat et Saint Jean Pied de Port, où le nouveau peuplement s'est greffé sur des quartiers déjà existants. A Saint Palais, à Larceveau et à Mongelos, on peut parler de formations de toute pièce aux alentours de 1228, date à laquelle Sanche le Fort démantelait les remparts de la ville neuve d'Ostabat, ouverte à peine fermée. A défaut de charte de fondation, la création de Saint Palais peut être attribuée au même Sanche le Fort, et la ville se prévaloir de sa situation à l'union des chemins et de Saint Jacques. L'attribution fondamentale des armes de Navarre, surmontées de la couronne royale à fleurons tréflés, rappelle son origine royale navarraise. Un même raisonnement et une même règle sont de mise pour Ostabat et pour Puente la Reina, ad Pontem Regine, qui drainait au pont de l'Arga la jonction opérée à peu de distance, au calvaire d'Obanos. Le monument du pèlerin placé à l'entrée de Puente la Reina correspond à la voirie moderne. TABLEAU DE L'UNION DES CHEMINS L'itinéraire de Bruges à Saint Jacques reprenait au Moyen Age celui de Tours à Saint Jacques, et fixait à Sorde la dernière étape de Gascogne, et à l'hôpital de Lagarrague de Saint Palais la première étape de Navarre. La Carte des itinéraires d'Europe, délivrée à Charles Quint et inversée, réduisait à deux le schéma des quatre routes de l'Hexagone: l'Oberstrasse, la route d'en haut des pèlerins allemands au XVème siècle, par Orthez, Orion, Sauveterre, Saint Palais, vers Saint Jean Pied de Port et la montagne de Roncevaux, nommément désignées; et la route d'en bas, la Nilderstrasse, de Bayonne à Tours, Paris, et Aix la Chapelle. Les deux itinéraires européens, des Flandres et d'Allemagne, faisaient leur jonction à Saint Palais. L'archevêque d'Arles lui même, Guillaume, en tête de ligne, et de compagnie, déclaraient successivement aux péagers de Saint Palais et d'Ostabat 50 chevaux et palefrois, 24 mules et mulets, 80 épées, et 2000 pièces d'or. Ils délaissaient la route du Somport pour Roncevaux.L'Itinéraire du Languedoc en Galice, au départ d'Avignon, mentionnait au XIVème siècle le pont d'Orthez, Sauveterre, dernière étape de Béarn, suivie de Saint Palais, première étape de Navarre. Le voyage du seigneur Nompart de Caumont à Saint Jacques et à Notre Dame des Fins de Terre en 1417 rejoignait l'itinéraire d'Orthez, de Sauveterre, et Saint Palais, vers Ostabat, Saint Jean Pied de Port, et Roncevaux. L'ensemble rayonnait autour du mont Saint Sauveur, plaque tournante des voies de Saint Jacques, et englobait la ville de Saint Palais au nord, et le carrefour de Gibraltar au sud. Antérieur au guide du Pèlerin, le carrefour a servi de limite aux territoires d'Uhart Mixe, de Larribar, et de Saint Palais, en direction de l'ermitage de Soyharce, de l'hôpital de Haranbeltz, et de la baronnie d'Ostabat. Le nom de Gibraltar s'est substitué au XIXème siècle à celui de Lindus. Par Saint Palais, ou par ses abords, concluait la Chancellerie de Navarre en 1623, les pèlerins allaient directement, drechamente, à Saint Jean Pied de Port et à Roncevaux. Le nouveau giratoire aux portes de Saint Palais s'ouvre à son tour sur le site de Saint Sauveur, le grand oublié de la table d'orientation de Soyharce, qui s'en tient à la traduction fautive du guide. Docteur Clément Urrutibéhéty Euskonews & Media 101.zbk (2000 / 11 24 / 12 1) Eusko Ikaskuntzaren Web Orria
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