Infrastructures et déplacements: la traversée des Pyrénées
* Traduction au français de l´original en basque
Baptiste Boloqui

Le processus d’intégration européenne a très significativement augmenté les échanges au sein de l’Union Européenne. Les pays de la Péninsule Ibérique, entrés tardivement dans l’espace communautaire, occupent aujourd’hui une place importante dans ces échanges. De ce fait, les flux transitant par les Pyrénées ont connu ces dernières années une très forte croissance ( + 410% entre 1985 et 1997 pour le fret dont 92% se faisant par la route) . En l’absence de mesures incitatives fortes modifiant les politiques actuelles de transport, les tendances passées devraient perdurer (les prévisions tablent sur une augmentation du fret de + 340% entre 1997 et 2020).

Par sa situation géographique stratégique, deux autoroutes ouvrant sur des axes transeuropéens et interrégionaux, des équipements (port, aéroport, gares et centre européen de fret) largement connectés sur les réseaux externes, le Pays Basque se trouve aujourd’hui au cœur des échanges Nord-Sud. Les flux transitant par ce territoire ont considérablement augmenté ces dernières années et atteignent actuellement le niveau du Perthus. Si cette situation présente des avantages réels à exploiter en terme d’activité économique, elle génère également des inconvénients qu’il convient de limiter. L’étroitesse du couloir au pied occidental des Pyrénées, fait peser au Pays Basque, des risques évidents de rupture d’équilibre : saturation des infrastructures, nuisances environnementales, concurrence foncière… Outre les problématiques liées aux infrastructures, ce sont donc, plus globalement, les conséquences urbaines, économiques et environnementales engendrées par un développement du trafic qu’il convient d’anticiper.

Les travaux de grande qualité, menés par la commission du CDPB, ont mis en lumière le caractère pluriel des réponses à engager, mieux à même de solutionner l’engorgement annoncé des infrastructures qu’un projet unique. En prenant appui sur ces travaux, le Conseil de Direction du CDPB souligne l’importance pour le Pays Basque:

  • de renforcer sa vocation logistique
  • d’inscrire les projets dans le concept de développement durable
  • d’adapter les infrastructures aux enjeux actuels de l’intermodalité
  • 1.- Renforcer la vocation logistique du Pays Basque
    Depuis un dizaine d’années, une activité économique importante basée sur le transport et la logistique se développe sur notre territoire. Des exemples récents, comme l’implantation de nouveaux groupes sur le centre européen de fret de Mouguerre, montrent qu’il s’agit là d’un secteur créateur d’emplois et de valeur ajoutée (sans oublier les perspectives nouvelles dans le domaine de l’enseignement supérieur et plus précisément dans la filière logistique).

    Le Pays Basque doit renforcer cette vocation logistique régionale en favorisant la mise en réseau du port de Bayonne, de la plate-forme Hendaye-Irun, du CEF de Mouguerre, et des infrastructures ferroviaires, routières et autoroutières. En amenant tous les modes de transport à fonctionner en synergie, par une politique volontariste favorable à l’intermodalité, ce secteur devrait connaître une forte expansion tout en apportant des solutions à l’augmentation du fret transitant par notre territoire, et participer à l’inversion de la croissance des flux au bénéfice du fer dans les 25 ans à venir.

    2.- Inscrire les futurs projets dans le concept de développement durable
    Pour endiguer l’accroissement des flux actuels, mais aussi dans une optique de développement des échanges, plusieurs projets sont actuellement à l’étude. Tant ferroviaires que routiers, tous convergent vers un même constat : les infrastructures actuelles ne seront pas en mesure d’assumer les flux futurs. Notre territoire sera concerné par des projets d’infrastructure dans les années qui viennent.

    Le Pays Basque constitue un espace d’une grande fragilité. Afin de répondre aux attentes des générations actuelles sans porter atteinte aux ressources des générations futures, des moyens conséquents devront être mobilisés pour, d’une part, évaluer l’impact engendré par toute création ou requalification d’un ouvrage et, d’autre part, répondre aux exigences environnementales les plus strictes lors de la réalisation des travaux

    Le respect de l’environnement et des équilibres écologiques, atouts majeurs de ce territoire, ainsi que l’insertion optimale du projet sur le site, doivent être un souci permanent de la réflexion. Cette orientation commande une large et authentique concertation entre les divers acteurs de la société civile, les collectivités territoriales et les services de l’Etat, dans le but de définir les conditions de l’acceptabilité sociale des projets.

    3.- Adapter les infrastructures aux enjeux actuels de l’intermodalité
    Avec des infrastructures largement connectées sur des réseaux d’échanges externes, le Pays Basque dispose d’un positionnement privilégié. Cependant, les perspectives de développement des échanges entre le nord et le sud de l’Europe interpellent ce territoire dans sa capacité à disposer des infrastructures nécessaires pour assumer ces flux.
    Dans ce contexte et outre le renforcement du CEF de Mouguerre, quatre axes opérationnels sont à privilégier:

    3.1- le renforcement de la voie ferrée entre Bayonne et la frontière
    Le Pays Basque se doit de donner la priorité au développement du ferroviaire (notamment pour le transport fret) en confirmant Bayonne comme nœud ferroviaire, et ce, pour trois raisons:

      • La priorité affichée par les collectivités, l’Etat et l’Europe pour favoriser ce mode de transport
      • Les projets de renforcement des infrastructures ferroviaires au nord (TGV Tours Bordeaux, bouchon ferroviaire de Bordeaux, amélioration des capacités entre Bordeaux et Dax)
      • Le projet du Y basque au sud reliant St Sébastien, Vitoria et Bilbao avec à long terme une jonction envisagée avec Pampelune

    Considérant l’hypothèse d’une forte expansion de ce mode de transport et la priorité donnée à ce dernier dans les politiques nationales et européennes, il conviendra d’évaluer très rapidement les capacités potentielles et les limites du réseau actuel entre le sud des Landes et la frontière, afin d’engager les aménagements nécessaires, notamment le bouchon de Bayonne- Mousserolles, sans exclure à priori une nouvelle ligne.

    3.2- la mise en 2x3 voies de l’A63
    Inscrite dans le schéma d’aménagement et de développement, cet aménagement est susceptible d’apporter à court terme une réponse au développement du trafic tout en permettant la mise aux normes environnementales de cette infrastructure

    3.3- la requalification du réseau routier avec la Navarre
    Compte tenu de l’effort de rééquilibrage souhaité au profit du ferroviaire, la création d’un nouvel axe routier de transit à haut débit susceptible de capter le trafic international ne paraît pas opportun. L’effort doit porter sur la requalification du réseau avec la Navarre en aménageant un des axes à définir, selon des normes qui pourraient être celles de la route Bayonne-Ustaritz, pour:

    • favoriser le développement du trafic interrégional ainsi que les échanges économiques et culturels avec cette province.
    • accroître avec des connexions complémentaires l’accessibilité entre l’Intérieur du Pays Basque et la Côte, contribuant ainsi à un développement équilibré du territoire.

    3.4- le renforcement du port de Bayonne
    Déjà engagés depuis plusieurs années, l’équipement du port et la politique de diversification des activités portuaires doivent être poursuivis.

    Le port de Bayonne ne constitue pas à proprement parler une solution au franchissement des Pyrénées, mais, au même titre que le CEF de Mouguerre, il offre une réponse partielle à l’engorgement des axes routiers en détournant sur la voie maritime une part des flux de transit à longue distance qui saturent les axes traversant le Pays Basque.

    Le transfert de mode qui s’ensuit constitue une opportunité remarquable de développement d’activités logistiques par l’apport de valeur ajoutée.

    Enfin, au niveau maritime, l’ouverture du port de Bayonne à des connexions régulières avec les grandes lignes de transport autour du globe (tout en renforçant les collaborations avec les ports de Bilbao et Pasajes) constitue à la fois un facteur de développement de nos entreprises et une réduction de l’engorgement des axes routiers convergeant vers le Pays Basque.


    L’augmentation annoncée des flux routiers ne constitue pas une fatalité. En favorisant les modes de transports alternatifs, en instaurant des mesures incitatives et dissuasives (financières et fiscales entre autres), la tendance peut-être, sinon inversée, tout du moins atténuée sur le court terme. Une politique de transport efficace doit amener les différents acteurs à cohabiter car le marché le permet. Certes, la route est un système très souple, mais les transporteurs routiers n’utiliseront-ils pas le fer ou le maritime, si le service est efficace, le coût compétitif et attractif ?

    Par la multiplicité des modes de transport présents sur son territoire, le Pays Basque possède des atouts majeurs. C’est de sa capacité à mettre en synergie ces différents modes qu’émergeront des solutions permettant de répondre à la problématique du franchissement des Pyrénées.

    Le «tout routier» s’imposera si des options de fond ne sont pas prises rapidement pour le moyen et le long terme en ne perdant pas de vue que l’aménagement ou la réalisation d’une nouvelle infrastructure ne se décide maintenant que pour dans quinze ans.


    Baptiste Boloqui, Secretaire General du Conseil du Developpement du Pays Basque

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